n°421.«Bouteflika et sa clientèle continuent de mentir au peuple»
« La société n’est pas une cruche vide que le pouvoir peut constamment instrumentaliser », réagit le sociologue Mohamed Mebtoul alors que le pouvoir algérien a annoncé le renoncement du président Abdelaziz Bouteflika à un cinquième mandat sans dire quand (et si un jour autre que celui de sa mort) il achèverait le quatrième. Professeur à l’université Oran 2, fondateur de l’anthropologie de la santé en Algérie ainsi que du Groupe de recherche en anthropologie de la santé (GRAS) à l'origine notamment d'une grande enquête sur la jeunesse, et auteur d'un ouvrage percutant Algérie : la citoyenneté impossible ? (éditions Koukou, 2018), Mohamed Mebtoul voit dans la déclaration de renoncement du président la promesse d'une continuité du régime. Entretien.
Comment analysez-vous la déclaration de renoncement du président Abdelaziz Bouteflika à un cinquième mandat et le report de l'élection présidentielle ?
Mohamed Mebtoul : Bouteflika et sa clientèle continuent en réalité de mentir au peuple. Comme dans la lettre du 3 mars 2019, où le président promettait après sa réélection une conférence inclusive avec la participation de l’opposition ainsi qu'une nouvelle constitution plus adaptée à la réalité politique et l'organisation d’une élection présidentielle anticipée sans lui, le pouvoir fonctionne à la manipulation et à l’instrumentalisation de l’histoire.
Placer premier ministre un ancien ministre de l’intérieur est une preuve irréfutable que le pouvoir est dans sa continuité à lui. Il ne répond en aucune façon aux attentes du mouvement populaire. Le discours d’aujourd’hui est très clair. Il stipule que c’est bien le même régime politique qui se recycle en organisant la conférence, en prenant les décisions qui lui permettent de rester au pouvoir. Le mouvement populaire a exigé la rupture avec le système politique et non pas sa reproduction. Bouteflika n’est qu’un des instigateurs du régime politique qui continue dans le mépris et l’irrespect du peuple.
Noureddine Bedoui, le nouveau premier ministre est un homme du système politique. Il a fait toute sa carrière dans l'administration en qualité de wali (préfet). Il est discipliné. Il appliquera à la lettre les instructions du clan présidentiel. En réalité, le maître d'œuvre du processus politique imposé par le haut – nouvelle constitution soumise au référendum, conférence nationale, préparation de l'élection présidentielle sans que l'on ait une date précise – est incontestablement le même régime politique en connivence avec le responsable de l'armée.
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